Le blog de la Guilde des Plumes

Martin Luther King – I have a dream

2962 signes espaces compris

Il en faut, du courage, pour affronter à coups de rêve(s) l’Amérique des années 60.

Souvenez-vous.

Nous sommes le 28 août 1963, à Washington. Plus de 250 000 personnes se pressent au pied du mémorial d’Abraham Lincoln pour réclamer, enfin, l’égalité des droits et la liberté des Noirs.

Martin Luther King a 34 ans et d’indéniables talents oratoires. Ce jour-là, il prononce le discours le plus célèbre de sa carrière, qui résonne pour les siècles des siècles comme les rimes d’un poème ou les rythmes d’une prière : « I have a dream. »

Et il le dit neuf fois. L’expression n’est pas choisie au hasard. Elle fait écho au rêve américain sur lequel les Etats-Unis ont bâti toute leur Histoire et toutes leurs ambitions. Martin Luther King ancre son combat dans les terres infinies du Nouveau Monde pour mieux en contester les lois.

Ses mots le prouvent.

Il sème les allusions à l’American dream comme autant de cailloux dans la chaussure de l’oncle Sam. Face à l’idéal de liberté, de prospérité, de droits inaliénables, de justice, de démocratie et d’égalité qu’il puise entre les lignes de la Constitution américaine, il dénonce la captivité, l’injustice, la ségrégation, la discrimination, la pauvreté et la persécution que vivent les citizens of color.

De couleurs, justement, il en est beaucoup question.

Martin Luther King, partisan de la non-violence, appelle à ses côtés tous ses compatriotes blancs. We cannot walk alone. Il convoque également des images colorées de l’Amérique profonde : les collines rouges de la Géorgie, les sommets enneigés du Colorado et les coteaux verdoyants de la Californie.

Puis il évoque la foi.

Car il est pasteur. Martin Luther King se place toujours sous le regard de Dieu. Cette rhétorique, inimaginable dans un discours politique français, est infiniment américaine. In God we trust. Alors le discours pointe inlassablement les paradoxes de cette fraternité sélective.

He had a dream.

Comme disait Brel : « On ne réussit qu’une seule chose : on réussit ses rêves. On a un rêve, et on essaie de bâtir, de structurer ce rêve**. » C’est donc à son rêve que Martin Luther King aura consacré sa vie, jusqu’à la perdre d’une balle dans la gorge. La gorge ! Justement la source des mots… Des mots qu’il choisit comme autant d’armes de conviction massive. Chaque phrase, chaque silence explose comme une note de musique par-delà le temps et l’espace.

Dans son rêve, la justice s’écoule comme de l’eau (justice rolls down like waters) et prend par le cœur un espoir de fraternité. Dans son rêve, la liberté retentit (let the freedom ring) et prend par la main toutes les générations futures. Sans distinction de sexe, d’origine ou de religion**.

Ami, entends-tu***… ?


Par Marion Haug 🪶 pour La Guilde des Plumes
* Extrait de l’interview de Jacques Brel par Henry Lemaire, 1971.
** Extrait de la Constitution de la République française, article premier.
** Extrait du Chant des partisans, texte de Joseph Kessel et Maurice Druon, 1943.