Le blog de la Guilde des Plumes

Clarisse Chabernaud, compositrice à la croisée des chemins 

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Clarisse Chabernaud

Disons-le d’emblée : ce n’est pas la plume qui est allée vers Clarisse mais bien le contraire.

Des études de Lettres, un Master à l’École normale supérieure de Lyon et un doctorat à la Sorbonne, n’allaient que conforter cette destinée.

Plume, elle voulait en faire son métier. Un point c’est tout. Et pas n’importe où, en politique d’abord.

Sous le parrainage de Flaubert et Racine

Clarisse s’est prise de passion pour ce métier en parcourant plus jeune les romans de Flaubert et les tragédies de Racine. Racine, un indéfectible lien allait justement naître à tel point qu’elle rédige une thèse pointue mais soutenue avec les félicitations du jury et qui a pour titre : « Le nom propre dans les tragédies de Racine. Étude linguistique et stylistique. » Flaubert, à sa manière, elle le fera parcourir les couloirs des ministères.

Mais il a fallu, avant cela, faire encore un peu ses preuves. La célèbre agence Havas lui ouvre alors ses portes. Elle devient consultante en Affaires publiques et relations presse. La voilà « à la bonne école » comme elle le dit elle-même. Elle pianote ensuite des articles précis et fournis pour le site lalanguefrancaise.com. Elle y aborde la grammaire et la littérature.

Une plume de ministres

Fidèle à son rêve, elle fait alors son entrée dans le monde de la politique au printemps 2023. Un tournant pas facile à prendre lorsque l’on vient du monde de la recherche. Mais Clarisse aime les défis – elle avait par exemple rédigé sa thèse en trois ans – une prouesse bien rare en sciences humaines. Elle devient donc plume de ministre. Son portefeuille : les personnes âgées et handicapées. Cela tombe bien. Clarisse tenait absolument à travailler pour les ministères sociaux.

Et c’est ainsi, perfusée par Flaubert, le romancier qui a sans doute le mieux saisi les complexités humaines et celles de la société au XIXe siècle, qu’elle se met à composer des discours empreints d’humanité.

Pour Clarisse, tout semble se passer alors à merveille : « Je m’étais tellement renseignée sur le métier de plume en cabinet ministériel que je n’ai absolument pas été déroutée. Je n’ai eu aucune déception. », commente-t-elle. Clarisse peut toucher du doigt à la fois son rêve de manier la plume mais tout en étant confrontée à une matière riche, humaine et où il est question du respect des droits fondamentaux. « J’avais l’impression de pouvoir écrire des discours qui allaient avoir une réelle portée et une utilité dans la vie des gens. », ajoute-t-elle.

Malgré les valses ministérielles, elle s’adapte, telle une virtuose, après chaque passation de pouvoir, au ton des différents ministres qu’elle côtoie. Il faut dire que sa thèse en stylistique l’a mise sur la bonne voie et qu’elle sait ainsi jongler entre différents styles.

Qui se nourrit de musique et de littérature

Pour Clarisse, musicienne avertie – le violon n’a pas de secrets pour elle-, pratiquant aussi la danse classique, le métier de plume ne peut être à ses yeux qu’un art. Et c’est ce qui fait justement tout son sel dans une société où les métiers scientifiques ont a priori plus la cote. Notre plus-value, c’est précisément de pouvoir faire entrer l’art dans un univers politique où le jargon est souvent technique. Et ça, pour Clarisse, cela a un côté « chic » !

Voilà toutes les raisons pour lesquelles Clarisse est d’abord une compositrice des mots.

Avec trois objectifs qu’elle poursuit : servir, servir l’orateur mais aussi le public à qui est destiné le discours ; traduire les idées pour qu’elles soient pleines de sens ; et vulgariser pour que le message soit clair, attractif et intelligible.

Elle se plonge dans Simone de Beauvoir, notamment La Vieillesse, qui est pour elle tout autant un monument de la littérature que Le deuxième sexe, et dans les œuvres d’Antoine de Saint-Exupéry et, forte de ces deux nouvelles références, s’en trouve inspirée pour des écrits toujours plus justes et humains.

Mais si Clarisse est une artiste dans l’âme, elle n’a pas le temps d’avoir la tête dans les nuages. Par chance, elle avoue n’avoir jamais été saisie par le syndrome de la page blanche. Tant mieux, parce que dans les ministères, sa production, qu’elle imagine comme le travail d’un artisan d’art, est vite devenue industrielle.

À l’âge de nouvelles résolutions

C’est ainsi qu’à 30 ans, elle se retrouve à la croisée des chemins, « un vertige », dit-elle elle-même. Peu importe, elle souhaite voguer sous d’autres horizons.

Clarisse s’attèle désormais à publier sa thèse et aimerait faire de même avec ses projets d’écriture personnels. En parallèle, elle imagine son avenir professionnel, se voyant bien ajouter quelques cordes à son arc, entre la communication et les relations publiques tout en nourrissant déjà d’autres rêves, comme celui de travailler en ambassade, aux Etats-Unis, en Allemagne ou en Italie. Avec toujours l’idée d’écrire les discours… Quand cela prend les tripes, difficile de s’en lasser.

C’est sans aucun doute vertigineux de se retrouver, après avoir fréquenté les ors de la République, à devoir faire les bons choix aujourd’hui. Mais quoi qu’il en soit, nous savons qu’avec Clarisse, les mots qu’elle couchera sur le papier, se consommeront toujours avec délice.

 

Aymar de Chaunac pour la Guilde des Plumes